En biologie et en écologie mathématiques, l'usage de grands systèmes de Lotka-Volterra est courant afin de modéliser la dynamique des écosystèmes faisant intervenir des espèces qui interagissent entre elles. Pour un réseau trophique composé de $n$ espèces, on note $\mathbf{x}_n(t)=(x_k(t))_{1 \le k \le n}$ le vecteur des abondances des espèces au temps $t$, où $x_k(t)$ désigne l'abondance de l'espèce $k$ (nombre d'individus, biomasse...) au temps $t$. Les abondances sont reliées entre elles par le système d'équations :
\begin{equation*}
\frac{dx_k(t)}{dt} = x_k(t)\, \left( 1 - x_k(t) + \sum_{\ell=1}^{n} M_{k\ell} x_{\ell}(t)\ right) \qquad \textrm{pour} \quad 1 \le k \le n\, ,
\end{equation*}
où $M_{k\ell}$ désigne l'effet de l'espèce $\ell$ sur l'espèce $k$.
Lorsqu'on étudie des écosystèmes impliquant de nombreuses espèces, il peut être difficile de mesurer les interactions et pertinent de les considérer comme aléatoires. Depuis les années $70$, certains écologues ont ainsi fait appel aux résultats de la théorie des matrices aléatoires (RMT) dans l'étude des réseaux trophiques.
Le c\oe{}ur de la problématique concerne l'existence à l'équilibre, i.e. lorsque $\frac{d\mathbf{x}_n}{dt}=0$, d'une solution faisable, c'est-à-dire une solution pour laquelle toutes les entrées $x_k$ sont strictement positives, ce qui correspond au scénario où aucune espèce ne disparaît au cours de la dynamique.
Par ailleurs, certains modèles font appel à des matrices creuses (sparses), c'est-à-dire contenant de nombreux zéros ; chaque espèce interagissant avec un petit nombre d'autres espèces. En RMT, l'étude des matrices creuses est assez récente et c'est dans cette optique que l'on s'intéresse à la question de la faisabilité de l'équilibre dans le cadre de matrices d'interactions aléatoires creuses.
Mathématiquement, une première approche de la sparsité consistera en le choix d'une matrice d'interactions $M_n$ portée par un graphe déterministe $d_n$-régulier. La matrice aléatoire $M_n$ a alors $d_n$ entrées non nulles par ligne et par colonne.
L'existence asymptotique, i.e. lorsque $n$ tend vers l'infini, d'un seuil de faisabilité est démontrée pour deux modèles : lorsque la matrice $M_n$ a une structure par blocs et lorsque le paramètre de sparsité $d_n$ est proportionnel à $n$.